Texte destiné au politicien ignorant la situation des réfugiés et à tous ceux qui ne savent rien de nous.
Nous sommes des êtres humains oubliés.
Vous devez savoir que cette histoire n’est pas inventée. Tout cela se passe tous les jours, avec tous ceux qui rêvent d’atteindre l’Europe (la terre des rêves et des libertés). Personne ne veut rencontrer la mort, alors que nous l’avons achetée avec notre propre argent en voulant arriver ici.
Un grand merci à tous ceux qui ont soutenu ou aidé des migrants, aucun mot ne peut exprimer ma gratitude.
Le voyage est en trois parties :
1ere : du Soudan ou d’Egypte à Agedabia.
2de : de Agedabia à Tripoli.
3e : de Tripoli en Italie.
J’ai écrit ce blog pour que les gens sachent ce qu’est le voyage de la mort, pour qu’ils sachent comment certains gouvernements traitent les migrants, d’une manière injustifiable. Je ne parlerai pas des pays africains, cela prendrait des années de les décrire, et veuillez excuser mon mauvais anglais.
Personne ne sait ce que les migrants ont traversé pour arriver jusqu’en Europe et même si quelqu’un le savait, il ne pourrait se mettre à notre place. Je ne souhaite à personne de ressentir ce que nous avons ressenti.
Le voyage est très dur d’Erythrée ou d’Ethiopie jusqu’au Soudan mais à chaque fois que l’on dit ça, que le plus dur est derrière nous, une chose plus dure encore nous attend.
Il y a deux moyens d’arriver en Europe, le premier depuis l’Egypte (nous y reviendrons plus tard), le second depuis le Soudan. Cela commence sur le marché libyen de Omdurman (Soudan), où de nombreux trafiquants font leurs affaires. Cela coûte 700€, parfois plus. Pour réunir autant d’argent, certains vendent leur maison, d’autres leur rein, ou tout ce qui peut rapporter quelque chose.
Après, il y a deux types de gens :
1 : ceux qui payent avant le voyage, la majorité d’entre eux
2 : ceux qui payent en arrivant en Libye (nous y reviendrons)
Le voyage commence une fois que l’intermédiaire s’est mis d’accord avec le passeur, il le contacte et ils se mettent d’accord sur le lieu où nous déposer, pour partir de Khartoum.
(Le plus drôle, ce sont les relations entre les trafiquants et la police. J’ai vu à Khartoum une conférence sur les trafics d’êtres humains.)
En montant dans le 4×4, le calvaire commence, car si sa capacité est de 30 personnes, on en fera monter 60, ajoutez à cela le désert, la soif, et la vitesse. Après des jours et des jours, on arrive au point de livraison à la frontière libyenne.
Je me rappelle précisément de ce moment parce que nous avons perdu beaucoup d’entre nous et parce qu’il n’y avait pas d’eau (nous avons dû boire notre urine), qu’ils nous ont laissé sans eau et sans nourriture pendant plusieurs jours.
Les passeurs libyens (les pires êtres humains sur terre) communiquent à coups de gifles et de coups de poing.
On est baladés de voiture en voiture jusqu’à de gros entrepôts comme les entrepôts d’Agedabia (seuls les passeurs les plus importants ont leur propre entrepôt).
Les entrepôt sont pires que la prison. Nous sommes privés d’air, de nourriture et enfermés comme du bétail.
A cet endroit, nous sommes séparés en deux groupes :
1er : ceux qui ont payé
2d : ceux qui n’ont pas payé (séparés à nouveaux en plusieurs groupes)
A : Ceux qui resteront dans l’entrepôt tant qu’ils n’auront pas payé ou quelqu’un n’aura pas payé pour eux
B : ceux qui seront emmenés par des libyens qui ont besoin de main d’œuvre bon marché, voire gratuite, contre une petite somme donnée au passeur.
Ceux-là seront jetés à la rue après plusieurs mois ou plusieurs années, sans rien, et devront collecter l’argent pour traverser la mer.
C : ceux qui travailleront pour les passeurs eux-mêmes, souvent ceux qui parlent arabe ou tigrigna et qui ressemblent à des gardes du corps (ils seront en charge d’organiser, de frapper les autres et parfois de fournir des filles aux passeurs. Ils travaillent ainsi quelques mois et sont ensuite relâchés).
Et ceux qui ont payé le prix seront soit envoyés dans la ville, pour travailler en Libye jusqu’à ce qu’ils aient rassemblé l’argent pour partir, car ils n’ont personne pour leur donner de l’argent. Les autres qui veulent continuer le voyage jusqu’en Europe doivent payer avant de partir d’Agedabia.
Traduire par sonia ben slama
Écrit par yousif haliem
A suivre…